POUR UNE TRANSITION ÉCOLOGIQUE PLUS JUSTE :
L’EXEMPLE DE L’ÉCONOMIE CIRCULAIRE

Compte-rendu de notre table ronde/débat sur l'économie circulaire

                                  

 

Cette réunion co-organisée avec le Pacte pour le pouvoir de vivre a réuni 25 participants en visio. Elle a permis à plusieurs acteurs de l'économie sociale et solidaire de décrire leurs pratiques en matière d'économie circulaire. La séance a été introduite par Muriel Martin Dupay, coprésidente de FNE Ile-de-France et Olivier Clément, secrétaire régional de la CFDT Île-de-France.

 

Premier grand témoin, Yann Fradin, vice-président d'Emmaüs France et fondateur de l'association Espaces qui pratique depuis trente ans l'insertion par l'écologie urbaine.

Yann a rappelé que Emmaüs s'était lancé dans la récupération et le réemploi dès l'après-guerre et que le mouvement, initié par l'abbé Pierre, s'était structuré sur ce modèle. Aujourd'hui, le réemploi est devenu tendance, les particuliers le pratiquent massivement via les réseaux sociaux et le secteur marchand s'y investit. Même si l'on peut se féliciter de ce mouvement anti-consumériste, cela pose la question de l'éthique. Du sens que l'on donne à ce que l'on entreprend.

L'économie circulaire a gagné ses lettres de noblesse en permettant l'insertion de personnes souvent très éloignées de l'emploi. Il importe de conserver cette dimension en développant les marchés réservés aux entreprises d'insertion ou en introduisant des clauses sociales dans les marchés publics.

L'expérience de l'association Espaces montre, pour sa part, qu'il est possible de créer de nouveaux emplois en inventant une nouvelle société. L'économie circulaire consiste à produire des biens et des services de manière durable en limitant la consommation et le gaspillage des ressources et la production des déchets. Ainsi Espaces a formé des « éco-cantonniers », et autres professionnels de l'environnement qui, en privilégiant les solutions fondées sur la nature, ont démontré qu'il était possible de valoriser les délaissés urbains (berges, talus ferroviaires, voiries...). Ces nouveaux métiers qui privilégient les « techniques douces » permettent de créer dix à vingt fois plus d'emplois que les pratiques classiques mettant en œuvre les traitements mécanisés et phytosanitaires. L'association a également développé des activités socialement utiles, telles que les jardins partagés, sans critères de performances ou de rentabilité.

Ces exemples montrent que l'économie circulaire ne peut pas être évaluée selon les critères prévalant dans la société marchande. Une nouvelle grille de lecture, basée sur l'éthique et l'utilité sociale reste à élaborer.

Sylvia Devescovi est intervenue ensuite pour présenter la coopérative "Cycle Terre" qui produit des briques en terre crue à partir de terres excavées. Cette expérience, emblématique de l'économie circulaire, a montré qu'au-delà des nouveaux métiers il faut inventer de nouveaux marchés. Celui des briques ou des panneaux en terre crue, que la coopérative est en train de mettre au point, n'existe pas dans la filière du bâtiment et des travaux publics. Il importe donc de sensibiliser et de former les acteurs du secteur. La fabrique, implantée à Sevran (93), emploi cinq salariés, dont deux en insertion, et vise la constitution d'une équipe de douze personnes en rythme de croisière. Il s'agit d'une petite unité, qui ambitionne de produire 600 000 blocs de terres comprimées par an, en créant de la valeur localement. C'est également une des caractéristiques de l'économie circulaire que de chercher à développer des circuits courts. Ce faisant, le problème du foncier se pose de manière aigüe. La fabrique ne dispose que de 2 500 m2 et ne peut envisager le séchage des terres sans apport d'énergie. Le développement de l'économie circulaire nécessite de mobiliser le plus de foncier possible pour être le plus vertueux possible, cela ne va pas sans créer des tensions quand le foncier est rare, ce qui est toujours le cas en milieu urbain.

La troisième expérience de terrain concerne la ressourcerie « La Mine » à Arcueil ( 94) elle est rapportée par Lætitia Warck, bénévole de l'association. A côté de l'association une entreprise d'insertion a été créée il y a 5 ans. Des objets usagés sont donnés par des particuliers, nettoyés et remis en état par des travailleurs en insertion puis vendus dans trois boutiques, dont une en ligne.

Lætitia insiste, elle aussi, sur l'insertion dans la ville et sur la question du foncier. La surface nécessaire pour la remise en état des objets doit être au moins équivalente à celle consacrée à la vente.

Francis Redon, président de Environnement 93, est intervenu ensuite et a fait un point sur la collecte des ordures ménagères, sur le fiasco du tri mécano biologique (TMB) et sur la nécessité d'accompagner le tri à la source. L'expérience menée sur le marché de Noisy-le-Sec par FNE Seine-Saint-Denis montre que l’accompagnement est indispensable pour obtenir des résultats significatifs.

Luc Blanchard, coprésident de FNE Île-de-France, a conclu la séance en replaçant la problématique du zéro déchet et de l'économie circulaire dans le contexte de la révision du SDRIF.

En effet il s'agit d'un des trois axes proposés par la région pour faire évoluer le SDRIF de 2013. Les deux autres, ZAN et ZEN, ont déjà fait l'objet d'un travail de la part du groupe de travail mis en place par FNE Île-de-France.

L'économie circulaire, qui a été documentée par nos intervenants durant l'après-midi, est sans doute l'axe le plus transversal. Il questionne notre modèle de société. Les modèles économiques classiques basent le développement sur une production de richesses qui détruit les ressources. L'économie circulaire promeut un système économique sobre en carbone, en énergie et en ressources naturelles. Il s'agit d'intégrer une exigence écologique à tous les niveaux de la conception, en passant par la production et le recyclage.

Concrètement cela veut dire substituer l'éthique à la recherche du profit. Privilégier les solutions basées sur la nature créatrice d'emplois non délocalisables. Permettre l'émergence de nouveaux marchés et de nouveaux savoir-faire. Réserver du foncier, y compris en milieu urbain dense, pour permettre que les déchets des uns soient la matière première des autres. Accompagner les usagers et les professionnels pour que ces nouvelles pratiques soient adoptées par tous.

Voir les présentations des intervenants :

Présentation du Pacte du pouvoir de vivre

ou en podcast

Sylvia Devescovi, Cycle Terre

Francis Redon, Environnement 93, présentation sur la collecte des biodéchets

Présentation du projet "La Mine" par Laetitia Warck

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