AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE
Une mini Défense à l'est de Paris ?
Pour le béton, pas de sursis !
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Malgré la situation sanitaire et les liens entre urbanisme délétère et santé, la Ville s’apprête à autoriser Bruneseau Seine, un quartier de tours hyperdense de 2 hectares : sept bâtiments de 10 à 55 étages, trois tours de 100 à 180 m de haut, collés aux monstrueuses tours Duos, en limite de Paris et d’Ivry.
Après les soixante-dix arbres de hautes tiges pour reconfigurer l’échangeur du Boulevard périphérique, ces derniers dimanches d’octobre, est tombée la splendide voûte des vingt-deux platanes, accompagnant l’ancien chemin de halage du bord de Seine. Jusqu’à la dernière minute, les militants de FNE Paris, FNE Ile-de-France, ADA 13, ARBRES, GNSA et des élus de tous bords ont espéré un sursis à ce massacre. Il n’y avait aucune urgence, sauf à rendre irréversible le projet de tour de 100 m de haut sur le quai : une piste cyclable à double sens serpentait avec bonheur entre les arbres et les études du tram T Zen en site propre étaient loin d’aboutir.
Ce geste ne restera pas impuni.
Place au béton !
La Ville cherche à équilibrer les comptes de la ZAC... avec une « mini Défense » plantée autour d’un échangeur du périphérique qui sera, assure-t-on, reconfiguré ! Elle bétonne là où les associations de la Concertation PRG demandent un parc, une respiration verte, dans ce site routier, enclavé et pollué. À Bercy, rive droite, la ville a décidé de réviser sa copie pour végétaliser et simplifier le méga échangeur, mais rive gauche, elle s’entête avec un quartier de tours !
Sur la lancée des appels à projets Réinventer, la SEMAPA* avait organisé, en 2017, une consultation de quatre équipes, sur un programme de 100 000 m². Elles ont chacune dépensé plus d’un million d’euros pour les études, c’est dire si le jeu en valait la chandelle !
Le projet retenu, Bruneseau Seine, porté par un groupement de cinq promoteurs, propose 90 000 m² de logements restaurants, commerces, équipements branchés, bureaux, espaces de co-working et locaux d’artisanat selon un modèle obsolète de ville verticale : aucun équipement public, aucun logement social, aucun espace vert ! Deux tours seront consacrées à des logements en accession. C’est, en pire, la version des tours du front de Seine des années 1970, périph et échangeur en plus.
Quelques logements étudiants et résidence pour personnes âgées, bénéficiant de fonds publics, participeront au financement des charges des copropriétés de ces coûteuses impasses verticales. Mais s’il fallait densifier la ville pour plus de logements sociaux, ne nous avait-on pas affirmé que les tours libéreraient des espaces - verts - au sol ?
Voyez la largeur des trottoirs au pied des tours : dur, pour les piétons !
Le Conseil de Paris n’avait-t-il pas voté que les immeubles de grande hauteur de ce site seraient destinés à des bureaux ? Que nenni, banco pour le logement privé. La maire promet que, dans sept ans, le périphérique sera transformé en boulevard urbain planté et apaisé sur lequel ouvriront ces nouveaux bâtiments. Quant à la desserte du quartier par les transports en commun, il faudra attendre longtemps le prolongement de la ligne 10 du métro non financé à ce jour. Ne cherchez pas les illustrations du projet dans les documents de campagne du maire du 13e ou de Mme Hidalgo, communication mensongère : vous ne trouverez que du vert !
À Paris, c’est le béton d’abord : la nature et la santé, c’est ailleurs qu’il faudra les chercher.
*SEMAPA : Société d'économie mixte d'aménagement de Paris.
Christine NEDELEC
Présidente de FNE Paris
fne-paris.fr