LA LIGNE 17 DU GRAND PARIS EXPRESS RESSUSCITÉE PAR LA COUR ADMINISTRATIVE D'APPEL DE PARIS
Communiqué
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A l’issue d’un feuilleton judiciaire riche en rebondissements, un arrêt de la Cour administrative d’appel (CAA) de Paris du 7 octobre 2021 rejette le recours collectif de FNE Ile-de-France et de plusieurs associations dont Collectif pour le Triangle de Gonesse (CPTG) contre l’autorisation environnementale de la Ligne 17 Nord. Cette décision éminemment critiquable et politique assombrit dangereusement l’horizon des terres agricoles du triangle de Gonesse.
En 2018, les associations opposées au projet Europacity se sont regroupées afin d’attaquer l’autorisation environnementale de la ligne 17 nord, permettant l’urbanisation des terres agricoles du triangle de Gonesse au profit du projet Europacity. Cette ligne du Grand Paris Express était en effet justifiée aux trois quarts par la desserte du projet de Méga-complexe commercial Europacity, sorte de temple de la consommation doté d’un golf et d’une station de ski indoor. Ce projet d’un autre temps a depuis été abandonné par le gouvernement, qui n’a pourtant jamais tiré les conséquences concrètes de ce choix politique. La société du Grand Paris milite depuis plusieurs années pour la construction coûte que coûte de cette ligne malgré les incertitudes constantes sur son utilité. La décision de la CAA de Paris lui permet ainsi d’investir 2 milliards d’euros d’argent public dans la construction d’une gare de trains en pleins champs, à 1,7 km des premières constructions environnantes, pour desservir un projet qui n’a pas encore été déterminé.
Sur le plan contentieux, cette décision constitue une anomalie dangereuse pour le droit de l’environnement. En effet, le Tribunal administratif de Montreuil a jugé à notre demande le 15 novembre 2019 la suspension des travaux de construction de la ligne 17 sur la période d’un an dans la mesure où l’étude d’impact était insuffisante. La juridiction administrative estimait notamment, en se fondant sur les 3 avis successifs de l’Autorité environnementale, que l’évaluation environnementale du projet était fractionnée et ne prenait pas suffisamment en compte les incidences cumulées du projet avec les autres projets alentours associés (notamment le projet Europacity et sa ZAC). La société du Grand Paris ayant fait appel de cette décision, la CAA de Versailles s’est prononcée de manière fort inattendue sur ce dossier. Par un arrêt du 19 novembre 2020, celle-ci casse l’arrêt du TA de Montreuil en l’estimant incompétent pour juger de cette affaire. La CAA de Versailles considère contre toute attente que ce contentieux est lié à l’organisation des Jeu olympiques 2024 (ce qui n’est pas le cas techniquement puisque la ligne 17 doit être mise en service en 2027) et que la CAA de Paris est compétente pour tout contentieux relatif à l’organisation des JO.
C’est dans ce contexte que le recours des associations a été porté devant la CAA de Paris. Au cours de l’audience, le rapporteur public a conclu à une confirmation de la solution du TA de Montreuil, soit à considérer que l’étude d’impact du projet était insuffisante et que l’évaluation environnementale avait été indument fractionné en contradiction avec le droit européen. La CAA de Paris vient de prendre la solution inverse, balayant sans ménagement l’ensemble des moyens validés jusqu’ici.
En rendant cet arrêt qui autorise la construction de la gare « Triangle de Gonesse », la Cour valide à rebours de l’autorité environnementale, du Comité National de Protection de la Nature, du TA de Montreuil et de son propre rapporteur public, la destruction des terres du Triangle de Gonesse, alors qu’aucun projet d’aménagement n’existe pour justifier cette station de métro sur ces 300 hectares de terres agricoles nourricières dans une région en tension.
Cet arrêt rappelle une autre situation similaire, lorsque la Cour Administrative d’Appel de Versailles avait rétabli en 2020 le PLU de la ville de Gonesse, qui avait classé les terres agricoles du Triangle en zone à urbaniser. Cette fois aussi, la cour avait déjugé le rapporteur public, le tribunal administratif, l’Autorité environnementale et le commissaire enquêteur de l’enquête publique, qui avaient tous émis un avis négatif à l’urbanisation de ces terres. Dans l’ensemble des contentieux liés à l’urbanisation du Triangle de Gonesse, l’intérêt de l’Etat semble prendre le pas sur le droit de l’environnement.
La détermination des associations luttant contre l’artificialisation des terres agricoles, qui ont marché sur Paris depuis toute l’Ile-de-France ce week-end à l’occasion de la « Marche des Terres », n’en est que renforcée.
Contacts presse
Maxime Colin, juriste de FNE Ile-de-France, maxime.colin@fne-idf.fr
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