AGRICULTURE ET ALIMENTATION
La Safer et la préservation des terres agricoles
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Membre du conseil d’administration de la Safer (Société d’aménagement foncier et d’établissement rural) de l’Ile-de-France, FNE Ile-de-France ne peut qu’être en phase avec ses objectifs clairement affichés de lutter contre l’artificialisation et le mitage des terres agricoles.
Pierre Marcille, président de la Safer Ile-de-France, fait le point sur les moyens dont elle dispose pour protéger les espaces agricoles et aider les jeunes agriculteurs à s’installer.
Qu'est-ce qu'une Safer ?
Créées par la loi d’orientation agricole du 5 août 1960, les Safer ont toujours pour mission le développement de l’agriculture, mais également la protection de l’environnement, des paysages, des ressources naturelles telles que l’eau et elles accompagnent les collectivités territoriales dans leurs projets fonciers.
Régulation du marché foncier rural
Au-delà des acquisitions amiables qu’elle réalise et qui représentent 98 % des surfaces qu’elle maîtrise annuellement, la Safer peut être amenée à préempter certains projets de vente. En effet, la loi fait obligation aux notaires de l’informer des cessions d’espaces naturels, agricoles et forestiers. Elle peut alors s’assurer de la compatibilité du projet de l’acquéreur avec les documents d’urbanisme locaux, les politiques agricoles et environnementales et avec les prix de vente pratiqués localement. Elle peut ainsi intervenir pour stopper les projets de vente qui pourraient menacer la vocation de ces biens ou qui ne correspondraient pas aux prix de référence : grâce à son droit de préemption, elle achète prioritairement le bien en lieu et place de l’acquéreur initial, de façon à pouvoir le revendre, avec un cahier des charges, à un attributaire dont le projet répondra à la vocation du bien et aux attentes des acteurs du territoire (élus locaux, agriculteurs, associations…). Ces préemptions restent toutefois limitées en surface. En 2020, la Safer de l’Île-de-France a été informée de 7665 projets de vente et elle est intervenue en préemption 226 fois (3 % des ventes). Quand le prix de vente est anormalement élevé, la Safer intervient en révision de prix de façon à éviter les phénomènes spéculatifs (76 % des préemptions en 2020). Cela concerne, en général, des petites parcelles menacées par le mitage.
Pour le moment, les ventes de terres via des cessions de parts de société échappent au contrôle de la Safer et, à défaut d’une grande loi foncière, c’est avec impatience qu’est attendue l’adoption par le Parlement du texte d’urgence du député Jean-Bernard Sempastous pour les encadrer.
Le choix des porteurs de projet
Il se fait par le comité technique départemental de la Safer au sein duquel l’ensemble des acteurs du territoire est représenté (agriculteurs, élus locaux, administration, association environnementale, forestiers, chasseurs…). Lors du choix, parmi les candidats à l’acquisition, le comité technique tient compte des priorités fixées dans le Schéma directeur régional des exploitations agricoles (SDREA) et des principales politiques publiques. C’est ainsi que sont favorisés l’installation de jeunes agriculteurs (en maraîchage biologique ou en petit élevage, par exemple) ou le confortement de structures agricoles de taille moyenne plutôt que l’agrandissement des grandes exploitations. Cependant, compte tenu du départ à la retraite de la moitié des agriculteurs dans les dix prochaines années, il est vraisemblable que certaines surfaces aillent à l’agrandissement. La Safer aide les porteurs de projet à l’installation à trouver du foncier et, compte tenu du renouvellement des générations agricoles, à conduire et des attentes de la société, elle ne peut qu’encourager les personnes qui souhaitent s’installer à la contacter et à contacter les organisations professionnelles agricoles.
Les outils : vigifoncier, vigimitage
Près des deux-tiers des collectivités franciliennes adhèrent à l’outil de veille foncière « vigifoncier », ce qui leur permet d’être alertées par la Safer de toutes les ventes en cours sur leurs territoires. Elles peuvent alors demander d’intervenir sur une vente à enjeu pour la commune (protection des espaces agricoles et naturels, lutte contre la cabanisation, rétablissement de continuités…).
Par ailleurs, toutes les collectivités locales franciliennes peuvent désormais accéder gratuitement depuis le 1er juin 2021 à un nouvel outil « Vigimitage ». Il s’agit d’un portail interactif accessible en ligne, et qui permet de déclarer tous les cas de mitage et d’accéder aux procédures à mener pour les résorber (avec des courriers types…).
Ces deux outils ont pu être mis en place grâce au financement apporté à la Safer par le Contrat de plan État-Région (CPER). Le cas échéant, la Safer peut aussi, par exemple, accompagner les collectivités avec la mise en place des procédures biens vacants sans maître ou d’une ingénierie foncière spécifique pour maîtriser et réhabiliter des sites dégradés ou pollués (avec, par exemple, l’appui de la Région Île-de-France via le plan régional pour la reconquête des friches franciliennes…).
Propos recueillis par Jane BUISSON
Représentante de FNE Ile-de-France
au Conseil d’administration de la Safer IDF
En application de la Loi d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt (LAAAF) du 13 octobre 2014, les statuts des Safer leur font obligation d’accueillir au sein de leur conseil d’administration un représentant d’une association agréée de protection de l’environnement. Il en est de même pour les comités techniques départementaux donnant leur avis sur les opérations foncières.