AGRICULTURE ET ALIMENTATION
La filière chanvre reprend des couleurs
grâce aux nouvelles réglementations du bâti
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Deuxième secteur polluant derrière celui des transports, le secteur du bâtiment est responsable de plus de 25 % des émissions françaises de gaz à effet de serre. Limiter son impact carbone représente donc un enjeu essentiel pour l’atteinte des objectifs nationaux, notamment ceux de la Stratégie nationale bas-carbone.
La conjonction de la loi climat et résilience et de la nouvelle réglementation écologique (RE2020), qui doit s’appliquer dès janvier prochain, devrait contribuer à l’essor des filières de matériaux biosourcés. Et parmi ces matériaux, difficile de faire plus vertueux que le chanvre[1]. La culture de la plante est respectueuse de la biodiversité, elle ne nécessite ni irrigation ni traitement phytosanitaire et ne génère aucun déchet dans sa transformation. Le chanvre ne concurrence pas la culture vivrière, c'est une culture de rotation (plantée en avril et récoltée en septembre). Elle régénère le sol en créant des microfissures profondes pour l’eau.
Bioressource par excellence, il permet de réaliser des économies d'énergie, d'emmagasiner la chaleur et de la restituer, annulant la nécessité d'un recours à la climatisation d'été. Transformé notamment en béton (mélange de chanvre, granulat et chaux), le chanvre possède des capacités de régulation thermique, d’isolation acoustique et de résistance au feu.
En Ile-de-France, la filière chanvre s’organise depuis quelques années mais jusqu’ici, la filière construction manquait de débouchés concrets. L’obligation d’utiliser 25 % de matériaux biosourcés dans les constructions relevant de la commande publique d’ici à 2030 et l’implantation récente d’une usine de préfabrication de panneaux bois en béton de chanvre à Aulnoy (voir encadré) en circuit court et sans intermédiaires devrait relancer la culture du chanvre. Ce projet a vu le jour grâce au soutien de l'État et de la Région Île-de-France, mais également de l'Agence de l'eau Seine- Normandie, intéressée par le fait que la production de chanvre ne nécessite pas d'arrosage et n'utilise aucun intrant chimique. Plusieurs partenaires franciliens sont associés au projet, notamment Planète Chanvre et Construire en chanvre en Seine-et-Marne et Gâtichanvre en Essonne. Cette dernière, après avoir été mise sous administration judiciaire, a enfin trouvé un repreneur et l’usine de défibrage de la paille sera remise en service en 2022.
La valorisation d’autres produits issus de la culture du chanvre et la recherche de nouveaux usages tels que les parpaings de chènevottes ou le béton de chanvre dans la rénovation énergétique des bâtiments ouvrent de nouveau horizons pour cette filière. De quoi redonner le sourire aux professionnels du secteur. Reste à convaincre les agriculteurs de se lancer dans la production. Le chanvre peut pousser quasiment partout, quelle que soit la qualité de la terre.
Catherine GIOBELLINA
Administratrice à FNE Ile-de-France
La SAS WALL'UP
La SAS Wall'Up est la première usine de transformation du chanvre qui produit et commercialise des panneaux préfabriqués montés sur ossature bois et constitués de béton de chanvre (mélange de chènevotte, de chaux et d'eau).
*Usine de 2 000 m2
*Production annuelle visée de 70 000 m2
Le béton de chanvre n'émet pas de COVs (composés organiques volatils) et le processus de fabrication des murs ne nécessite aucun produit chimique. Maisons de ville, logements collectifs, lycées et même le village Olympique … vont pouvoir bénéficier de cette innovation industrielle.
[1] Voir Liaison 185