AVIS ET CONTRIBUTIONS
AVIS DE FRANCE NATURE ENVIRONNEMENT ÎLE-DE-FRANCE
L'enquête publique du projet de SCOT de la Métropole du Grand Paris (MGP)
FNE Ile de France, fédération de 400 associations franciliennes d’environnement, souhaite donner son avis sur le projet de schéma de cohérence territoriale de la Métropole du Grand Paris, document qui encadrera le développement de la métropole, au coeur de la région-capitale, pour les 15/20 ans à venir.
En effet, l’accélération du réchauffement climatique renforcée par la densification du tissu urbain et les menaces visant les espaces naturels et forestiers en région Ile-de-France nous conduisent à formuler plusieurs observations sur un projet métropolitain qui ne répond pas à l’urgence de prise en compte d’alertes et de données objectives en constante évolution.
En l’état actuel le projet de SCOT ne répond pas aux défis environnementaux et sanitaires tant à l’échelle régionale que nationale et européenne. Une modification du projet apparait donc indispensable.
Nos remarques transversales portent sur les points suivants:
- Tout d’abord la priorité doit être donnée à l’adaptation et à l’atténuation davantage qu'à la recherche d’une attractivité économique renforcée. Et ce, avec des objectifs chiffrés et territorialisés.
- La maitrise de la consommation d’espaces dans les six départements et les 131 communes de la MGP, la protection des espaces de nature et la sauvegarde de la biodiversité et des continuités écologiques ainsi que la préservation de la ressource en eau apparaissent à nos yeux prioritaires.
- La prise en compte des impacts, sur la santé humaine, des pollutions ( air, bruit..) et des risques nécessite une réorientation des objectifs pour atteindre la neutralité carbone , organiser l’économie circulaire et viser un réel développement de mobilités alternatives aux déplacements motorisés individuels.
- La mise en cohérence du projet de SCOT, à l’échelle du territoire métropolitain, est indispensable avec le Plan Climat-Air-Energie Métropolitain (PCAEM), le Plan Métropolitain de l’Habitat et de l’Hébergement (PMHH), avec les PLUI et le futur PLU bioclimatique de Paris. Comme à l’échelle régionale, avec le SRCE, le SDAGE et le projet de SDRIF-E (Schéma Directeur de la Région Ile-de-France).
- Enfin nous regrettons la durée insuffisante de l’enquête publique (34 jours) sur un document de cette importance et la faiblesse des moyens mis en place pour informer le grand public sur les propositions d’avenir de la métropole.
Nos préconisations sont les suivantes:
1. Ajouter dans le Document d’Orientation et d’Objectifs (DOO) des prescriptions précises s’imposant aux PLUI en fixant un seuil maximal - en référence aux valeurs de l’Organisation Mondiale de la Santé- pour éviter ou réduire les pollutions (pollution de l’air, pollution sonore notamment et risques) en interdisant l’implantation de logements, équipements et services recevant du public à proximité des axes autour desquels le niveau de pollution est supérieur aux normes OMS en particulier zones aéroportuaires, grands axes routiers et ferroviaires. La récente condamnation par le Conseil d’Etat obligeant l’Etat à payer des astreintes pour non respect des seuils limités de pollution de l’air notamment dans l’agglomération de Paris impose la mise en place rapide, concrète et coordonnée de la Zone à faible Emission (ZFE) sur le territoire de la MGP en articulation avec les objectifs
du PCAEM.
2. Revoir certains objectifs, en particulier quantitatifs, et proposer des prescriptions précises pour que la déclinaison du SCOT au niveau des territoires de la MGP soit efficace:
- en particulier en réduisant significativement la consommation prévisionnelle d’espaces naturels, agricoles et forestiers (en deçà du chiffre de 195 ha indiqué dans le projet) ;
- en classant les espaces encore non bâtis en réserves pour espaces verts notamment dans les secteurs fortement carencés; pour ce faire il convient de se baser sur des cartes plus précises que celles du MOS (notamment celles proposées par FNE Ile de France et ses fédérations)
- en imposant 50% d’espaces verts dans le total de la superficie des zones d’aménagement prévues, celles ci devant aussi intégrer dans l’étude d’impact environnementale l’énergie grise nécessaire la réalisation du projet d’aménagement
- en rendant obligatoire la part de pleine terre à un niveau de 50% au niveau de la parcelle pour tous les projets de construction ou d’aménagement. Ce pourcentage peut être augmenté en fonction de la taille de la parcelle. En cas de démolition / reconstruction la règle des 50% s’applique. Aucune végétalisation de façade ou du toit ne peut amener à réduire ce pourcentage.
- en appliquant la recommandation du plan climat air énergie métropolitain qui oblige les nouveaux projets à désimperméabiliser des surfaces existantes correspondant à 1,5 fois les surfaces nouvellement imperméabilisées par l’opération.
- en obligeant, en cas d’abattage d’arbres, la plantation d’un nombre d’arbres à proximité ayant le même volume foliaire que l’arbre abattu. En cas d’impossibilité à proximité, financement de la replantation dans les mêmes conditions sur le territoire métropolitain.
- en protégeant la continuité des trames vertes, bleues, noires en articulation avec les différents documents de planification: SRCE, SDRIFE, PLUI, PLU de Paris; Les prescriptions devront être renforcées notamment pour les sites Natura 2000 en Seine-Saint-Denis
- en réalisant un diagnostic en matière de Trame noire (sur le modèle du SCoT des Vosges centrales) et en incluant des orientations très favorables à la biodiversité nocturne et la trame noire. Il est nécessaire par ailleurs d’inclure dans le PADD des objectifs généraux visant à ce que les constructions nouvelles ne causent pas davantage de nuisances lumineuses et à préserver les paysages et l’environnement nocturnes par une meilleure adaptation de l’éclairage artificiel la nuit.
- en incluant la Seine au titre des grands paysages structurants, y compris à la limite de Paris, pour favoriser la protection des paysages et la circulation aéraulique.
- en orientant l’aménagement de l’espace public en faveur des piétons qui en sont les principaux utilisateurs.
3. Intégrer dans le SCOT des objectifs de rééquilibrage emploi/habitat et des modalités alternatives au transport individuel :
- Revoir, par une modification législative, l’objectif de construire 38 000 logements/ an qui n’est pas réaliste et articuler les objectifs de rééquilibrage emploi./logement avec les objectifs du SDRIFE dans ce domaine
- Intégrer la reconversion de bureaux en logements essentiellement lorsque le déséquilibre emplois/logements est trop fort à l’échelon local en interdisant toute construction neuve de bureaux et l’obligation de convertir une partie en logements en cas de réhabilitation lourde.
- Privilégier, avec des objectifs chiffrés, le réemploi de friches urbaines et bâtiments vacants pour situer le SCOT dans la trajectoire du ZAN (Zéro Artificialisation Nette) pour les projets d’activités économiques et logistiques et pour l’habitat
- Privilégier, en priorité, l’implantation dans les zones déficitaires en logements avec des surfaces conséquentes réservées à des espaces de télétravail interentreprises pour réduire fortement les déplacements pendulaires.
- Etendre au niveau métropolitain l’obligation de consacrer une part de logements sociaux (objectif SCOT: 22 700)/an) dans tout programme de construction. Le pourcentage de logements sociaux est proportionnel à la surface totale de plancher envisagée. Développer le principe du Bail réel solidaire sur tout le territoire de la Métropole.
- Exiger, sauf impossibilité vérifiée, la construction de logements traversants pour favoriser le bien-être, la ventilation naturelle et limiter les pollutions. Fixer la hauteur minimale sous plafond à 2.7m pour tenir compte de la mixité des usages.
- Renforcer de manière prioritaire l’offre de services publics dans les quartiers en difficulté, garantir un accès à des services médicaux de proximité
- Faire évoluer les infrastructures routières existantes vers des voies urbaines apaisées accueillant différents types de transport alternatifs à la voiture (pistes cyclables, voies réservées aux transport en commun), favoriser le report modal dans le réseau des transports en commun, favoriser une tarification permettant l’intermodalité.
- Organiser la perméabilité des transports en commun entre la MGP et la grande couronne pour mieux répartir les bassins d'emplois de demain.
4.Préserver la ressource en eau et préciser les articulations du projet de SCOT avec les SDAGE et PRGI 2022-2027
- Interdire la construction de logements, d’équipements publics et d’activités économiques dans les zones inondables et prévenir les risques d’inondation liés à une artificialisation du sol en zone inondable
- Faciliter la réouverture des rus et rivières et donner des objectifs et un calendrier précis, notamment pour la Bièvre, la Morée, le Croult, la Vieille Mer, le Sausset, le Ru de Rungis, le Morbras, l’Orge, le Ru de Marivel et ses affluents, le Ru de Vaucresson et le Ru de Saint-Cucufa.
- favoriser la sobriété dans l’usage de la ressource en eau : Prioriser chaque fois que possible les eaux brutes plutôt que l’eau potable , Favoriser le recyclage/ la réutilisation locale (assainissement, rus, ruisseaux, etc.).
- Expérimenter sur un territoire volontaire la réutilisation des eaux usées épurées.
- Imposer le Zero rejet dans la gestion des eaux pluviales
- Maintenir des réservoirs d’eau potable ou non à des fins de rafraichissement. pour lutter contre les ilots de chaleur
5. Préciser des objectifs globaux en matière de sobriété énergétique, d’économie circulaire et de développement des énergies renouvelables
- Donner à la MGP le pouvoir de financer la rénovation thermique des bâtiments en contrepartie d’une prise d’hypothèque de rang1 récupérable en cas de vente ou lors de la transmission aux héritiers.
- Prévoir dans les documents d’aménagement et d’urbanisme des prescriptions limitatives pour l’implantation d’entrepôts logistique et de data center
- Anticiper la réduction des déchets et favoriser l'économie circulaire (gestion des déchets des travaux du gd paris).
- Favoriser les projets d’énergies renouvelables et de récupération par exemple valorisation énergétique par la méthanisation de la bio masse, géothermie, récupération des boues des stations d’épuration et privilégier les filières moins carbonées.
- Favoriser le développement de filières courtes d’approvisionnement, dans les différentes filières agricole, BTP, etc. respectueuses de l’environnement.
- Détails
AVIS
Contribution de France Nature Environnement Ile-de-France à la consultation du public sur le Programme d'action nitrates 7
______
Le programme d’action national (PAN) nitrates se doit d’être un levier de mise en œuvre de la directive cadre sur l’eau visant à restaurer la qualité des écosystèmes grâce à la réduction et la prévention de la pollution des eaux par les nitrates d’origine agricole. Ainsi les « zones vulnérables » instaurées par la directive font l’objet de programmes d’action visant à restaurer la qualité des eaux et des milieux aquatiques.
Force est de constater que les programmes d’action nationaux et régionaux « nitrates » successifs se sont révélés inefficaces et n’ont pas infléchi la tendance à la hausse des surfaces classées « zones vulnérables » et la situation concernant la pollution des eaux de surface et des eaux souterraines par les nitrates est inquiétante. Après l’échec des six programmes précédents pour réduire la présence de nitrates, il serait donc judicieux de changer de stratégie. Or, le projet de PAN 7 ne propose que des évolutions mineures qui n’en feront pas un cadre suffisamment exigeant pour apporter des avancées significatives dans le reconquête de la qualité des eaux et des milieux aquatiques.
L’Ile-de-France est particulièrement concernée par la problématique nitrates avec 100 % des départements de la grande couronne classés en zone vulnérable. Les concentrations en nitrates sont en hausse et ont des effets néfastes sur la biodiversité (eutrophisation) et sur les prélèvements en eau potable. Ainsi, entre 2000 et 2017, plus de 119 captages d’eau potable ont dû être abandonnés dans la région !
Le bilan de la mise en œuvre du programme d’action régional (PAR) nitrates réalisé par les services de l’État a montré qu’il n’y a pas d’amélioration globale de la qualité de l’eau vis-à-vis des nitrates depuis 2014. En particulier, malgré quelques améliorations locales, 66 % des points de surveillance en eaux superficielles présentent des tendances à la hausse.
Le modèle agricole conventionnel dépendant des énergies fossiles et soumis à l’augmentation de leur coût a montré ses limites. Nous entendons bien par ailleurs les plaintes des professionnels de l’agriculture vis à vis de la complexification des mesures proposées dans le programme tandis que nous dénonçons leur insuffisance. Cependant nous déplorons une vision à court terme alors que les enjeux environnementaux sont vitaux sur le long terme et qu’il est urgent d’orienter les exploitations vers des pratiques plus vertueuses.
Il est désormais indispensable d’avoir une approche globale, et que le PAN soit élaboré en cohérence et en lien avec les autres politiques sectorielles concernant l’activité agricole telles que la réduction des émissions de polluants de l’air (ammoniac, protoxyde d’azote), le projet agro-écologique, le programme stratégique national (PSN) de la politique agricole commune (PAC), la réduction des gaz à effet de serre dans l’objectif de lutter contre les changements climatiques.
Nous souhaitons que cela incite à sortir de l’impasse, sur le plan environnemental, que constitue l’utilisation des engrais azotés. Voir les études sur ce sujet, en particulier le scénario proposé par une équipe internationale de chercheurs et publiée le 18 juin dans la revue One Earth (Remodeler le système agro-alimentaire européen et boucler son cycle de l'azote : le potentiel de combiner changement alimentaire, agroécologie et circularité). Chiffres à l’appui, les chercheurs montrent que l’Europe pourrait atteindre l’autosuffisance alimentaire en 2050 sans recours aux engrais azotés.
En conclusion, nous demandons que les avis de l’Autorité environnementale et du Conseil national de l’eau soient entendus, que leurs recommandations soient prises en compte et que les ambitions du PAN 7 soient donc significativement relevées. Cela doit s’inscrire dans une stratégie d’ensemble pour une transition agro-écologique ciblant de meilleures performances environnementales de l’agriculture et s’accompagner de la mise en place de dispositifs d’incitation et d’évaluation.
- Détails